Lettre BFC Banque Privée n°7

2018 : PEUT-ON VRAIMENT PARLER D’ANNÉE BLANCHE ? Il est monnaie cou- rante d’entendre dire, çà et là, que l’année 2018 est « une année blanche » : il n’en est malheureusement rien. En effet, en 2018, il conviendra d’acquitter l’impôt lié aux revenus perçus en 2017. Puis en 2019 sera prélevé à la source l’impôt relatif aux revenus 2019. La véritable différence en 2018 se matérialisera par la non-imposition des « revenus courants » perçus durant cette même année. L’imposition de ces derniers sera annulée par le Crédit d’Impôt de Modernisation du Recouvrement (CIMR) ;il sera en ce sens possible de parler de « revenus blancs ».Seuls les revenus exception- nels seront taxés à un taux moyen d’imposition, par définition inférieur au taux d’imposition ordinaire (TMI). Revenu courant ou revenu exceptionnel ? Par essence,il convient de considérer comme courants les revenus perçus de manière pérenne. Constituent par exemple des reve- nus courants les salaires, les revenus fonciers, les bénéfices industriels commerciaux (BIC), les bénéfices non commerciaux (BNC), les bénéfices agricoles (BA) ou encore les rému- nérations de gérants sous conditions. A contrario , constituent des revenus excep- tionnels les dividendes, les plus-values de valeurs mobilières, les primes exceptionnelles, les rachats sur contrats d’assurance-vie ou de manière générale,tout revenu non susceptible d’être perçu annuellement. Quels sont les leviers d’optimisation fiscale cette année ? Il existe trois grands vecteurs d’optimisation de l’impôt sur le revenu : la « non-augmen- tation » de la base imposable, la réduction de la base imposable (notamment par le mécanisme des déductions) et la réduction de l’impôt à payer (crédit/réduction d’impôt). Lesquels sont porteurs cette année ? Les déductions peuvent, par exemple, être la conséquence de versements sur des Plan d’Épargne Retraite Populaire (PERP) ou sur des contrats Madelin, de la réalisation de travaux immobiliers ou encore de rachats de trimestres de retraite. BANQUE POPULAIRE BOURGOGNE FRANCHE-COMTÉ − BFC BANQUE PRIVÉE MAI 2018 LETTRE N°7 E X P E RT Julie GARCIA Ingénieur Patrimonial Cette année, les déductions seront inutiles fiscalement en présence de seuls revenus courants. En effet,ainsi que nous l’avons précé- demment évoqué, le Crédit d’Impôt de Moder- nisation du Recouvrement permettra déjà de gommer l’impôt afférent aux revenus courants. En revanche,les déductions seront pleinement efficaces dans le cas de la seule perception de revenus exceptionnels. Nombreux sont les contribuables à nous interroger sur l’opportunité de réaliser des travaux immobiliers ou d’avoir recours à des investissements en déficit foncier du type SCPI cette année. Qu’en est-il vraiment ? En règle générale, les travaux de faible ampleur et non urgents seront inutiles fisca- lement. À l’inverse, le recours à des investis- sements nécessitant des travaux conséquents génèreront une économie fiscale supérieure àcellequiauraitétéobtenuelorsd’uneannée d’imposition classique. Qu’entend-on par travaux importants ? Il s’agit de travaux qui permettraient de générer un déficit reportable sur les années suivantes. Faut-il souscrire ou continuer les versements sur les PERP et Madelin ? Les avantages fiscaux liés à la souscription de ces dispositifs retraite retrouveront leur per- tinence en 2019. La réponse est plus nuancée concernant les versements durant l’année 2018. En effet, lorsque l’on dispose d’un PERP sur le- quel des versements ont été effectués en 2017 et que des versements sont envisagés en 2019,il serait dommageable de réduire les versements en 2018 car cela aurait un impact négatif sur la déduction des cotisations en 2019. En matière de contrat Madelin, l’absence de versements en 2018 pourrait avoir des consé- quences désagréables. D’une part, l’obligation de versement annuel ne serait pas respectée et d’autre part, la réduction ou le non versement en 2018 pourrait engendrer un bénéfice ou une rémunération exceptionnels taxables. Quid des réductions et crédits d’impôts… ? Les investissements permettant une réduction d’impôt du type Pinel,Malraux et Girardin et les crédits d’impôts tels que l’emploi d’un salarié à domicile conservent leur efficacité fiscale. Malgré l’absence d’imposition des revenus courants perçus en 2018, ces avantages fiscaux viendront s’imputer, le cas échéant, sur les revenus exceptionnels taxables en 2018 puis viendront s’ajouter au Crédit d’Impôt de Modernisation du Recouvrement remboursé en septembre 2019, toujours dans la limite du plafonnement global des niches fiscales. De surcroît, du fait de la redéfinition des secteurs éligibles à la Loi Pinel, certaines villes de la région présentent encore un intérêt de ce point de vue jusqu’à la fin de l’année. Quelles sont les incidences des décisions initiées en 2018 ? Les dirigeants d’entreprises et les indépendants devront être vigilants au moment de détermi- ner leur rémunération en 2018. En effet, l’administration fiscale a mis en place un système anti-abus ayant pour conséquence d’assimiler à des revenus exceptionnels, pour les revenus 2018, la fraction de leur rémuné- ration dépassant celle perçue les trois années précédentes, sauf si la rémunération de 2019 dépasse celle finalement perçue en 2018. Bercy souhaite ainsi dissuader « les stra- tèges » qui seraient tentés de faire varier leur rémunération à la hausse comme à la baisse afin de profiter d’un éventuel effet d’aubaine sur les revenus perçus en 2018. Les travaux immobiliers réalisés en 2019 ne subiront pas le même traitement fiscal si des travaux ont été réalisés en 2018. En effet, sans travaux réalisés en 2018, seuls 50 % des travaux de 2019 pourront être déduits. À l’inverse, si des travaux sont réa- lisés en 2018 et en 2019, les travaux réalisés en 2019 seront déductibles à hauteur de la moyenne des travaux réalisés ces mêmes an- nées. Enfin, concernant le PERP, le versement en 2018 permettrait de bénéficier d’une dé- duction totale des versements réalisés en 2019. A contrario , lorsque les versements ini- tiés en 2018 sont inférieurs aux versements réalisés en 2017 et 2019, une moyenne sera calculée afin de déterminer la déduction fis- cale autorisée au titre de 2019. 2018 n’est donc véritablement pas une « année blanche » en termes de déci- sions d’investissement. Aussi, au-delà de leurs éventuelles conséquences civiles et économiques, conviendra-t-il de porter également une attention particulière à leurs conséquences fiscales sur cette année et sur l’année à venir.

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