Lettre BFC Banque Privée n°5

PAROLES D ' EXPERT Quand arrive le mo- ment de céder sa PME, le dirigeant peut être confronté à un choix cornélien : doit- il vendre en direct les parts de sa société et supporter l’impôt ou bien aurait-il plus à ga- gner à faire vendre les participations par sa so- ciété holding et dans ce cas, gérer le remploi des fonds au travers d’une structure devenue purement patrimoniale ? Le choix peut être dicté simplement par le ré- sultat du jet d’une pièce, pile ou face (limitant le risque de se tromper à 50 %).Ou alors il est possible de comparer les avantages et inconvé- nients de chaque hypothèse. I - Cession de participations détenues en direct La cession, par le chef d’entreprise, de ses participations détenues en direct peut effec- tivement être source d’une charge fiscale et sociale conséquente. Les gains retirés entrent dans le régime fiscal des plus-values mobilières. Ces dernières ne bénéficiant plus du prélèvement forfaitaire libératoire depuis janvier 2013, elles sont intégrées aux revenus et taxées au barème progressif de l’impôt sur le revenu des par- ticuliers. Le risque, bien entendu, est de faire grimper la tranche marginale d’imposition à des hauteurs vertigineuses… Heureusement, le régime d’imposition a été aménagé (à de nombreuses reprises) afin de limiter la charge fiscale de « nos pauvres pigeons »… pardon, chefs d’entreprise. L’article 150-0 D du Code Général des Impôts prévoit ainsi un abattement pour durée de détention, à l’image du dispositif déjà en place depuis de nombreuses années pour les plus-values immobilières. Ce dispositif concerne toutes les plus-values mobilières, pour peu que les titres cédés soient bien des actions ou parts sociales ou encore, dans le cas de fonds communs, à condition que ces derniers soient a minima composés de 75 % d’actions. Ainsi, notre chef d’entreprise pourra pré- tendre à un abattement de 50 % s’il détient les titres depuis au moins deux ans, voire 65 % s’il les détient depuis au moins 8 ans. Cet abattement peut passer à 50 % pour les durées de détention de 1 et 4 ans, à 65 % entre 4 et 8 ans et à 85 % au-delà de 8 ans, à condition que les titres cédés concernent une société créée depuis moins de 10 ans au moment où notre dirigeant les a acquis. Mais ce n’est pas tout : si, en plus de céder son entreprise, il en profite pour prendre des congés à long terme et liquide ses droits à la retraite dans les deux ans précédant ou suivant la cession, le montant de la plus-value sera alors abattu de 500 000 € fixes et le reliquat pourra bénéficier des abattements majorés précédemment étudiés. De quoi réduire significativement la note fiscale in fine … ou pas, car tous ces abatte- ments ne bénéficient qu’au seul impôt sur le revenu. Les prélèvements sociaux (15,5 % à l’heure actuelle) se calculent toujours sur la plus-value brute, tout comme la contribution sur les hauts revenus,qui n’a d’exceptionnelle que son nom ! II – Cession de participations détenues via un holding Voyons maintenant comment se passe la ces- sion lorsque le cédant est la société holding (soumise à l’IS). Selon les dispositions de l’article 219,I-a quin- quies du CGI, le montant net des plus-values à long terme réalisées sur certains titres de participation fait l'objet d'une imposition à taux nul, sous réserve de la prise en compte, pour la détermination du résultat imposable, d'une quote-part de frais et charges de 12 % (depuis fin 2012). Seule cette quote-part de 12 % se trouve donc taxée au taux de l’impôt sur les socié- tés (33,33 % actuellement, voire 15 % dans certains cas). Dans un premier temps, cette hypothèse ap- paraît sensiblement moins coûteuse que la vente en direct par le chef d’entreprise. Les récentes déclarations des pouvoirs publics allant dans le sens d’une réduction du taux d’IS, cet écart peut être amené à s’amplifier. Mais il convient de noter que dans ce sché- ma, le produit de la vente reste acquis à la société holding. Pour en disposer à titre personnel, le chef d’entreprise devra sortir les fonds de sa structure : Par rachat d’un compte courant d’associé, hypothèse la plus favorable car neutre au niveau fiscal, mais encore faut-il disposer d’une créance à un niveau suffisant. Par versement de dividendes ou par réduction de capital. Dans les deux derniers cas malheureusement, on retrouvera une friction fiscale potentiel- lement lourde puisqu’à nouveau, les sommes dégagées se trouveront incluses dans les reve- nus personnels de notre dirigeant. Reste la solution de gérer le capital ainsi dégagé au sein de la société holding et de l’utiliser au fil de l’eau, selon les besoins de revenu du dirigeant. Les sommes versées (sous forme de dividendes) bénéficieront d’un abattement de 40 % avant d’être inté- grées aux autres revenus personnels. La détention de certains actifs au sein de la société holding trouve ainsi tout son sens, le régime fiscal de l’impôt sur les sociétés per- mettant de gérer au mieux l’imposition de la structure et le versement de dividendes pou- vant remplacer efficacement la perception de revenus fonciers, par exemple. À noter toutefois que les bienfaits de l’IS en matière de détention d’un patrimoine immobilier deviennent préjudiciables en cas de revente, eu égard à la réintégration des amortissements passés pour le calcul du prix de revient et donc, in fine , de la plus-value im- posable, même si certaines stratégies à long terme et à base de démembrement ou de bail à construction peuvent aboutir à un ré- sultat plus heureux. * On le voit bien une fois de plus, il n’y a pas de solution miracle (mais qui y croyait vraiment ?). Il conviendra donc, pour tous les futurs cédants, de s’interroger sur leur situation personnelle suffisamment en amont de la cession. Car plus que tout, une cession doit être anticipée afin de pouvoir, le cas échéant, disposer du temps nécessaire à la mise en place de la stratégie idoine. « Le temps de la réflexion est une écono- mie de temps ». Et comme le temps, c’est de l’argent… Stratégies de cession de sa PME BANQUE POPULAIRE BOURGOGNE FRANCHE-COMTÉ − BFC BANQUE PRIVÉE SEPTEMBRE 2017 LETTRE N°5 E X P E RT Xavier DESCUS, Directeur du Pôle Patrimonial de la Nièvre

RkJQdWJsaXNoZXIy Mjc4MjQ=